lundi 12 septembre 2011

D'une certaine chambre à soi

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Il fut un temps où je possédais dans une pièce dite chambre, un bureau... un espace propre à l'écriture. Après la chambre de bonne dans le IIe arrondissement lors de mes études d'Art, après le studio dans le XIVe arrondissement lorsque j'exerçais l'enseignement du dessin et de la vannerie dans des établissements parisiens, je vivais un grand bouleversement dans ma vie. C'était dans les années 80, je dus travailler alors dans une très grande et belle boutique du Forum des Halles-Paris Ier et j'habitais un deux-pièces dans le XVIIIe arrondissement .

J'avais bien sûr lu, dans les années féministes et lorsque je côtoyais mes amies enseignantes, le fameux livre –Une chambre à soi- de Virginia Woolf. Je l'avais cette pièce dans laquelle, en plus d'un lit et d'une armoire, j'y avais installé un coin atelier avec chevalet et matériel de peinture et à l'opposé, près de la fenêtre sur cour, le bureau avec sa lampe d'architecte rouge, sa chaise grillagée rouge de chez Habitat (j'étais design-addict ... je travaillais dans la décoration) J'aurais pu m'y mettre... à cette création tant souhaitée et attendue. J'écrivais bien en 1977:
-De nouveau, se pose le problème de la créativité. Je vis, mais je ne crée pas. Les jours s'écoulent mais il n'en reste rien. J'ai une maison agréable, un travail qui me plait. Deux éléments qui me paraissaient importants, il y a deux ans. J'ai créé mon intérieur, les cours de dessin me permettent de survivre, mais j'ai besoin de produire autrement. Je n'arrive pas à localiser cet autrement: est-ce la peinture ou l'écriture. Les deux à la fois peut-être. Trouver le lien. Que la peinture et l'écriture se mêlent indistinctement sur la surface blanche. Et la grande question: suis-je capable de cette création?- (journal d'avril 1977)

Et bien non, seule à écouter du Barbra Streisand et du Lavilliers, je rêvais ma vie d'artiste... J'étais dans l'attente. C'était pourtant le moment pour moi, c'étaient de bons moment avec moi, seule dans ma chambre... Sans m'en rendre compte, j'ai mis de côté l'écrit et le papier, le pinceau et les couleurs. Ce sont écoulées quatre années consacrées à mon travail assez prenant, aux sorties dites parisiennes, aux nouveaux amis et à de petits voyages aux Baléares et à Venise, que mon salaire me permettait de faire. Je ne réfléchissais plus, je ne m'analysais plus. Je n'étais plus devant une porte fermée, je suis entrée dans la vie, dans ma vie. Je l'ai prise dans mes bras pour ne plus la lâcher.

J'allais bientôt pousser une autre porte, la troisième... J'étais encore loin de la cabane de l'écriture.

Texte de caroline_8 et photo de Virginia Woolf

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