mercredi 7 septembre 2011

Tout ce que le poète et le peintre peuvent rêver,

la nature l'a créé en cet endroit. G. Sand
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16 août 1982: arrivée à Palma de Mallorca, 14h15 du vol IB 491
20 août 1982 : Valldemosa
Visite à la Chartreuse et de ses jardins où vécurent Chopin et Georges Sand durant l'hiver 1838-1839. Indisposée par les touristes, j'ai su m'isoler quelques brefs instants et capturer en photos, l'ombre et la lumière, l'entre-deux portes, la voûte et le passage... vers la solitude, la retraite si dûment désirée.


21 août 1982 : le soir, chambre 216, hôtel Eden à Puerto Soller
Ce matin, inspirée par les mots et la couleur, j'ai acheté un carnet et des crayons. Auparavant dans la petite église de Deya, perchée sur son rocher, j'avais écouté une jeune femme jouer de son piano noir ; elle s'exerçait pour son concert du soir. Elle jouait, me semblait-il pour moi; pas vraiment, une femme du village composait des bouquets de feuillages verts, d'œillets roses et d'œillets blancs. Et moi, dans l'obscurité un peu à l'écart, j'écoutais. Au creux de mon être: un désir vague et précis à la fois de trouver la paix avec moi-même. Faim de calme mais pas d'oisiveté comme j'ai cru en avoir besoin à mon arrivée sur l'ile. La musique, les statues de saints et la promenade - parmi les pierres tombales du cimetière de Deya où sont enterrés parmi les espagnols, quelques touristes anglais et allemands venus s'échouer ici et ainsi terminer le voyage de leur vie - cet instant de solitude et de recueillement m'ont apaisée. Redescendue au village, tout naturellement j'ai choisi dans la petite épicerie-bazar, le cahier de dessin et les couleurs.

Soller : A l'arrêt du car, un homme en est descendu ; ce sud-américain a pour tout bagage son chevalet pliant et un vieux chapeau. Le peintre maigre et sec, la peau brûlée par le soleil, descend le long des criques pour y trouver sa substance. C'est avec une pointe d'envie que je l'ai suivi des yeux : il semble léger et libre. A t'il trouvé ce qu'il cherche, ce dont il a besoin pour donner un sens à son existence? Mais maintenant que je possède le moyen de créer, le temps m'est compté. Demain pour le dernier jour, j'ai décidé de passer la journée en pleine nature : face à la mer, à la Cala de Deya, petit port de pêcheurs.


22 août 1982 : Cala de Deya
Seule à descendre du car, sur la route de Deya et Valldemosa, seule face à un sentier surplombant la mer cachée par la falaise et les pins, seule bien que le chauffeur majorquin à qui j'avais demandé de me déposer à une crique, me faisait signe : la mer étant par là... Tant bien que mal, j'amorçais la descente très vite raide ; les cailloux roulaient sous mes pieds, puis il n'y eut plus de sentier et je me retrouvais sur un promontoire rocheux. Assailli par des vagues grondantes et écumantes, le gros caillou glissant ne permettait pas l'accès à une plage d'ailleurs inexistante. Immobile et pétrifiée, je pris conscience de mon infinie solitude, du danger à chuter de ce plongeoir et pensais que les miens à Paris n'auraient jamais rien su de ma disparition. C'est avec crainte mais prudence, que tout doucement je fis marche arrière, posant délicatement mes pas puis m'accrochant fermement au taillis, je remontais vers le chemin. Avec le sentiment que l'on s'était moqué de l'étrangère, je suivis la route et quelques 2 ou 3 km plus loin et plus bas, je découvris la Cala de Deya où je passais l'après-midi à me remettre de mon émotion.

23 août 1982: décollage de Palma de Mallorca, 16h 05 du vol IB 492

Texte de caroline_8 [tiré de mon Journal - Août 1982] à mettre en parallèle avec l'extrait du texte Un hiver à Majorque de Georges Sand et peinture de Lisa Hooper et de Malcolm Ludvigse

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